Il est temps qu’Haïti se réveille et se transforme !

Un quotidien sans lendemain !   

Sur sa propre terre natale l’Haïtien est traité en paria. Aujourd’hui, sa situation s’est empirée. Comme un animal traqué incapable de retourner à sa tanière, il se déplace constamment à la recherche d’un abri hypothétique en vue d’échapper à la furie des gangs armés. Il éprouve un malaise profond. La peur le hante, l’habite, le paralyse. La terreur se répand tout autour de lui. Son quotidien est constitué de menu bien entretenu et qui imprègne son être :  le vol, le viol, le kidnapping, les exécutions sommaires, le massacre, l’exhibition des armes de guerre, le crépitement sans répit de balles assassines, la faim et toutes autres formes cruelles de violence.

Ce décor existentiel, peut-être sans précèdent dans les annales de l’histoire haïtienne, s’apparente à un chaos planifié. Le peuple haïtien a pourtant fait le choix de vivre en toute liberté. A titre d’illustration, le préambule de la Constitution de 1987 amendée est clair, précis et net. Deux points essentiels, entr’autres, se lisent comme suit :

  1.  « La garantie des droits inaliénables et imprescriptibles du peuple à la vie, à la liberté et la poursuite du bonheur-conformément à son Acte d’Indépendance de 1804 et à la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948. »
  2.  L’instauration d’un régime gouvernemental basé sur les libertés fondamentales et le respect des droits humains, la paix sociale et l’équité économique »,

Le milieu fait plutôt application de la loi de la jungle. Ceux et celles qui détiennent le monopole de la force ne se préoccupent guère du bien-être de la collectivité. Toutefois, ils s’en servent dans leur seuls intérêts exclusifs et pervers.  Ils piétinent, terrassent les plus faibles qui exécutent leurs quatre volontés.  

Une chronique pathétique !

Le rapport final du groupe d’experts sur Haïti fait un récit sur la complexité de la situation politique et économique, sur le phénomène d’insécurité amplifiée par l’augmentation de la violence armée et du contrôle exercé par les gangs. Ce phénomène se comprend davantage s’il faut considérer le manque de personnel de la seule force de l’ordre, la Police Nationale d’Haïti. Celle-ci, en plus de la méfiance installée en son sein, est mal équipée et mal formée pour faire face à la complexité de la situation sur le terrain et est incapable de reconquérir les territoires occupés par les gangs. Ce phénomène monte d’un cran parce que le système judiciaire est délibérément saboté par les gouvernements successifs, fortement politisé et gangrené par la corruption endémique.

Le rapport décrit avec force détails des faits en rapport avec notre pratique coutumière d’aventuriers. Mentionnons-en deux :

  1.  « Un groupe relativement restreint de familles puissantes en assure le contrôle. Celles-ci mettent leurs intérêts commerciaux concurrents au-dessus de tout. Plusieurs membres des élites économique et politique siphonnent les ressources publiques et mettent les gangs et la violence au service de leurs objectifs politiques ou économiques, tout en sapant l’état de droit pour préserver leur impunité. »
  2.  « Certains acteurs économiques utilisent des gangs pour assurer la sécurité de leurs entreprises ou saboter leurs concurrents, tandis que l’élite politique les finance pour mobiliser ou contrôler les électeurs. »

De tels faits décrits, connus, acceptés et vécus comme simples et divers appellent certaines interrogations. Comment comprendre le fonctionnement d’une telle société dans son ensemble ? S’agit-il de phénomène nouveau ? S’agit-il plutôt de l’étape ultime d’un modèle de société en mode de reproduction constante de ses errements et de ses bêtises ?

La société haïtienne a atteint le paroxysme de la déchéance la plus abjecte.

Il est navrant de constater l’effondrement progressif et total du paysage haïtien pendant les quatre dernières décennies. Tout le corps social sue la corruption, la malversation. Un lien indissoluble semble se tisser entre les forces ténébreuses. En considérant dans un grand ensemble le renouvellement du personnel politique, l’engouement des bandits de grand chemin, des repris de justice, pour briguer un mandat électif, tout le support médiatique mis à contribution pour faire non seulement leur apologie mais encore l’apothéose de leur réussite en modèle avec comme effets d’ensemble la médisance et le dénigrement servis avec plaisir et à satiété par de prétendus influenceurs, le financement astronomique consenti, en la matière, par ceux-là mêmes qui sont les véritables manœuvriers de toute une collectivité, il y a lieu d’admettre que cette peinture nous installe en pleine sauvagerie hurlante. « La bêtise engendre le mal »

Les élections générales de Février 2006 étaient plus ou moins acceptables. Des dix candidats qui ont brigué la présidence, Rene Préval a obtenu dès le premier tour 51.21% et a été réélu pour un second mandat présidentiel.  L’avènement de la 48eme législature n’inspirait pas tellement la crainte. 

En l’année 2011, les choses dégénèrent. À la faveur de transactions politiques douteuses et maffieuses, Michel Joseph Martelly fut élu Président de la République d’Haïti. La 49eme législature est perçue comme une association de malfaiteurs. Des parlementaires ont utilisé la violence tout au cours de leur campagne et le jour des urnes pour se faire élire. 

En l’année 2016, toute la mise de la finance est faite sur Jovenel Moise. Il devient le Président élu de la République. C’est le comble. Désormais, le Parlement n’assure plus le contrôle de l’Exécutif selon ses attributions constitutionnelles. Il se convertit en force de pression pour obtenir des portefeuilles ministériels, pour envahir l’administration publique ainsi que la diplomatie transformée en kindergarden. Les forces de l’opposition mènent bataille et espèrent un appel du pied de l’Exécutif. Les acteurs économiques s’activent pour que le capital investi lors de la campagne rapporte le maximum de profit.

Dans cet environnement délétère, les protagonistes doivent disposer de leurs gangs. « L’influence des politiciens et des acteurs financiers sur les activités des gangs est de nature systémique. Les politiciens et les élites économiques qui souhaitent obtenir des votes ou protéger leurs biens paient généralement les gangs en nature ou en espèce, une pratique qui a progressivement enrichi les gangs et leur a donné plus de pouvoir »

Actuellement, le nombre de gangs opérant en Haïti se chiffre à deux cents. Vingt-trois grands gangs opèrent dans la seule zone métropolitaine de Port-au-Prince.  Faits divers ! En Haïti, tout se parle, tout se sait. Albert Einstein aurait dit : « Deux choses sont infinies : l’Univers et la bêtise humaine. Mais en ce qui concerne l’Univers, je n’en ai pas encore acquis la certitude absolue. »

Nos devanciers parlent.

Cette déchéance, est-elle l’héritage d’un passé ? Nos chercheurs, nos écrivains, nos hommes politiques avaient déjà présenté en leur temps un tableau sombre d’Haïti au 19 eme siècle. Pour le centenaire d’Haïti, le texte écrit par Pierre François Joseph Benoit Rosalvo Bobo est révélateur d’un mal profond. Lisons un extrait :

« Haïtiens, vous parlez de fêter le centenaire de votre liberté. Ce n’est pas vraiment ingénieux comme trouvaille d’occasion de nouvelles fantasmagories.

 Centenaire de nos égarements, de nos bassesses, et au milieu de vanités incessantes, de notre récession systématique.

Centenaire de nos haines fraternelles, de notre triple impuissance morale, sociale et politique.

Centenaire de ce qu’il peut y avoir de plus odieux au sein d’un groupement d’hommes.

Centenaire de la ruine d’un pays par la misère et la saleté. »

Antenor Firmin, de sa terre d’exil, publie en l’année 1911 un ouvrage au titre évocateur « L’effort dans le mal ». C’est une réflexion testamentaire et prophétique sur l’état d’Haïti. Il écrit ce qui suit : « Homme, je puis disparaitre sans voir poindre à l’horizon national l’aurore d’un jour meilleur. Cependant, même après ma mort, il faudra de deux choses l’une : ou Haïti passe sous une domination étrangère, ou elle adopte résolument les principes au nom desquels j’ai toujours lutté et combattu. Car au XXème siècle et dans l’hémisphère occidental, aucun peuple ne peut vivre indéfiniment sous la tyrannie, dans l’injustice, l’ignorance et la misère. »

Que faire aujourd’hui ?

Mes chers compatriotes, à l’aube même de notre indépendance, les luttes fratricides et meurtrières ont sapé notre légende « L’Union fait la force », vidé de son contenu notre devise nationale « Liberté-Égalité-Fraternité » et avili notre hymne national « La Dessalinienne ». Elles ont plutôt favorisé l’industrie de la haine et du mensonge que nous continuons d’entretenir et d’alimenter. 

Que faut-il faire pour stopper le déchirement du tissu social haïtien ? Le rôle d’un groupe d’hommes et de femmes avant gardistes, responsables et matures est prépondérant. Notre littérature politique est garnie de réflexions et de considérations en la matière. ‘’ La vocation de l’élite’’, l’ouvrage de Jean Price Mars, devrait nous en inspirer. Le penseur dénonce notre incapacité à créer une pensée solide, cohérente et profonde. « Lorsque les élites échouent, l’ordre politique a de bonnes chances de s’effondrer ».

Quelle peut être la posture politique correcte que nous devons épouser pour construire et asseoir une pensée constructive ? Quelle est cette politique pertinente capable de nous aider à faire taire notre ego, à transcender dans l’intérêt supérieur de la société haïtienne ?

Une Haïti forte, régénérée, éduquée, prospère, fréquentable et enviable, c’est le sens de notre combat.

« Elever la foule vers l’Elite et ne pas abaisser l’Elite au niveau de la foule, voilà en quoi résulte le véritable progrès économique » Gustave Lebon.

signature de l'article de la présidente, Edmonde Supplice Beauzile, sur la nécessité que les elites en Haiti fassent preuve de dépassement pour le réveil et la transformation nationale.
Médaille Gustavo Carvajal reçue par la présidente, Edmonde S. Beauzile, du parti Fusion des sociaux démocrates Haïtiens.
? Gustavo Carvajal décernée par la COPPPAL à la présidente

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